Préparer vos chevaux à passer l’hiver à l’extérieur

Quand j’ai commencé à pratiquer, je recevais chaque hiver des appels m’avertissant que certains propriétaires laissaient leurs chevaux dehors même lorsqu’il faisait très froid. Ces gens bien intentionnés voulaient s’assurer que les chevaux n’étaient pas à risque de souffrir du froid. Il est inévitable que les non-initiés se posent cette question et, que même certains propriétaires aient des craintes par rapport au choix d’hiverner leurs chevaux à l’extérieur. Est-ce sécuritaire? Met-on la vie des chevaux en danger si on les laisse dehors même durant les grands froids de février? Comme tout bon vétérinaire, je me dois de répondre oui à la première question et non à la deuxième, mais avec des conditions.

Il est vrai qu’un cheval adapté peut très bien passer l’hiver à l’extérieur même si c’est une pratique plus ou moins fréquente au Québec. Par contre, certaines conditions doivent être respectées pour assurer la sécurité et la santé de ces chevaux. L’article qui suit a pour objectif de faire le point sur les éléments et les conditions indispensables pour que vos chevaux soient en mesure de rester à l’extérieur tout l’hiver tout en restant heureux et en santé.

État de santé

Si l’on pense faire hiverner nos chevaux à l’extérieur, il ne faut pas s’y prendre à la dernière minute. Il y a des choses à prévoir qui, si elles ne sont pas faites, peuvent nous empêcher de garder nos meilleurs compagnons dehors pour profiter de l’hiver. Une des premières choses à faire est de s’assurer du bon état de santé des chevaux qui doivent passer l’hiver à affronter les écarts de température et les précipitations qui ne sont pas toujours de la neige. Les températures froides demandent beaucoup d’énergie aux chevaux qui doivent les affronter. Il est donc essentiel que ces derniers ne souffrent d’aucun problème de santé leur soutirant une énergie supplémentaire pouvant compromettre leur stabulation extérieure. Si vous avez l’intention de faire passer l’hiver dehors à vos chevaux, je vous conseille fortement d’en discuter avec votre vétérinaire pour qu’il fasse un bilan de santé complet de vos chevaux, administre les vaccins et les vermifuges appropriés et vous donne des conseils personnalisés pour chacun d’eux afin que ces derniers passent l’hiver avec facilité et que vous les sentiez en sécurité. Il est évident qu’hiverner à l’extérieur n’est pas possible pour tous les chevaux. Certains auront des problèmes particuliers ou des utilisations trop fréquentes les empêchant de passer l’hiver au froid. C’est pourquoi il est important de s’assurer de leur état de santé et de réfléchir sur leur utilisation prévue avant de décider de les garder à l’extérieur. Si cela s’avère impossible, pour quelque raison que ce soit, il n’en demeure pas moins qu’un cheval a besoin de sortir en liberté en hiver comme en été. Dans ces cas, certaines précautions sont à prévoir. Elles seront discutées dans un prochain article.

Protection contre le froid

En général, nos hivers sont froids et humides, et comme tout animal à sang chaud, les chevaux sont affectés par les chutes de température. Avant d’envisager de les garder à l’extérieur pour des périodes prolongées, il est important de s’assurer qu’ils possèdent les moyens de protection nécessaires pour conserver leur chaleur corporelle.

La protection naturelle

Le gras est un isolant, il est donc une excellente protection naturelle contre le froid. On n’a qu’à penser aux baleines et aux phoques avec leur importante couche de graisse sous la peau qui leur permet de survivre dans les eaux glacées de l’Arctique. De plus, la lutte contre le froid nécessite une dépense d’énergie additionnelle et le gras constitue une réserve de cette énergie que le cheval peut utiliser s’il en a besoin. Il est donc important de s’assurer que votre cheval est en bonne condition de chair avant le début de l’hiver. Un bon indice est la présence d’une couche de graisse sous la peau des côtes. Si les côtes sont trop proéminentes, il se pourrait que votre cheval bénéficie de la prise de quelques kilos pour l’aider à se garder au chaud et éviter qu’il ne perde du poids durant la saison hivernale. L’évaluation du poids est aussi importante, car un poids sous la normale peut être signe de problèmes de santé qui risquent de s’accentuer lorsque le mercure descendra. Votre vétérinaire sera en mesure de vous aider à déterminer si votre cheval a un poids idéal et à vous assurer qu’il est en bonne santé. Si nécessaire, il discutera avec vous de la nécessité de faire des changements dans son alimentation pour favoriser la prise de poids ou le maintien d’un poids optimal pour la saison hivernale.

Ah! Les joies du pelage d’hiver. Beaucoup de propriétaires aimeraient ne pas avoir à faire face à ce poil long et épais qui est difficile à nettoyer et qui donne l’impression que son cheval ressemble à un ours. Par contre, la présence de cette toison est indispensable pour tout cheval qu’on veut laisser à l’extérieur durant l’hiver. Ce poil joue un rôle primordial dans la protection de votre cheval contre les froids de l’hiver. Lorsqu’il fait froid, le poil se hérisse emprisonnant une couche d’air qui se réchauffe à la chaleur du corps servant ainsi d’isolant. Il est donc important de s’assurer que son cheval développe un bon poil d’hiver. Si ce n’est pas le cas ou s’il est tondu, il serait plus approprié de le sortir lors des belles journées ensoleillées avec une bonne couverture sur le dos.

Les abris

Bien que les chevaux soient bien adaptés pour combattre les éléments climatiques, il est nécessaire de leur fournir un abri pour les protéger des températures extrêmes. Les vents froids peuvent entraîner des problèmes parce qu’ils balaient rapidement la chaleur corporelle produite drainant ainsi les réserves énergétiques. Les pluies froides et le grésil peuvent aussi être inquiétants, car ils refroidissent la peau par le phénomène de conduction en plus d’aplatir les poils diminuant leur pouvoir isolant. Par contre, le froid et la neige, lorsque le vent est absent, ne sont généralement pas un problème pour les chevaux en bonne santé et bien adaptés. Les écarts climatiques du Québec hivernal nécessitent donc l’accès à un abri pour les chevaux hivernant à l’extérieur.

L’accès à l’eau

Un cheval adulte de 500kg a besoin de boire environ 25 litres (approximativement 7 gallons) d’eau par jour pour subvenir à ses besoins. Il s’agit d’une moyenne et beaucoup de facteurs peuvent faire varier cette quantité. Il serait faux de croire que le froid fait diminuer le besoin en eau de votre cheval et encore moins de penser que la neige est un bon substitut à l’eau. Une des façons d’aider votre cheval à se garder au chaud est d’augmenter la quantité de foin qu’il mange, car lorsque ce dernier est digéré, il produit de la chaleur. Un cheval qui augmente sa consommation de foin augmente aussi ses besoins en eau. Par contre, il a été démontré que les chevaux boivent moins lorsque la température de l’eau qui est disponible est trop froide. Si le cheval ne boit pas assez et qu’il continue à manger, il devient plus susceptible de développer des problèmes digestifs tels les coliques par impaction. Il est donc impératif que les chevaux hivernant à l’extérieur aient accès à de l’eau en tout temps et particulièrement lorsqu’il fait très froid. La température de l’eau devrait idéalement se situer entre 2 et 10°C.  Au Québec, la meilleure façon de garder l’eau à la bonne température est de se munir d’un chauffe-eau. Même si les chevaux adultes en santé peuvent survivre quelques jours en mangeant de la neige s’ils ont à leur disponibilité un fourrage de qualité, il n’en est pas de même pour les juments gestantes, les poulains, les chevaux âgés ou malades. La vérification quotidienne du bon fonctionnement de votre système d’approvisionnement en eau est donc indispensable, car les bris, les fuites et les tuyaux gelés sont toujours possibles.

ATTENTION : Notez bien qu’il ne faut jamais ajouter de sel à la source d’eau extérieure des chevaux, que ce soit pour l’empêcher de geler ou pour stimuler la consommation d’eau. Assurez-vous plutôt de mettre un bloc de sels minéraux à leur disposition pour combler leurs besoins.

L’accès à la nourriture

Comme je l’ai mentionné au début de cet article, les chevaux sont des animaux à sang chaud qui doivent maintenir leur température corporelle à l’intérieur de limites assez strictes pour survivre. Le corps du cheval ne déploie que très peu d’énergie à réguler sa température quand la température extérieure demeure à l’intérieur de sa zone de confort. Par contre, lorsqu’elle descend en dessous de sa température limite inférieure (entre -15 et 0°C au Canada), la production de chaleur est augmentée. Pour être en mesure de soutenir cette augmentation d’activité métabolique, le cheval a besoin qu’on lui fournisse un surplus d’énergie. Chez la plupart des chevaux adultes en santé, une diète constituée d’un fourrage de bonne qualité servi à volonté, et l’accès à un bloc de suppléments minéraux est tout ce qui est nécessaire pour qu’ils soient en mesure de conserver leur poids en hiver. En effet, le foin est la meilleure source d’énergie qu’on puisse donner aux chevaux hivernant dehors. Le foin contient beaucoup plus de fibres que le grain et la fermentation de ces fibres par la flore bactérienne du gros intestin produit beaucoup plus de chaleur que la digestion et l’absorption des grains dans l’estomac et le petit intestin. Il n’en demeure pas moins que certains chevaux qui ont de la difficulté à conserver leur poids auront besoin d’un supplément de grains en plus du foin qu’il leur est fourni. Cela peut aussi être le cas lors d’hivers particulièrement froids et pluvieux où les demandes en énergie dépassent la quantité de foin qu’un cheval peut manger dans une journée. S’il devient nécessaire de supplémenter vos chevaux en grain, n’oubliez pas de le faire de façon graduelle pour éviter les problèmes de coliques et de fourbure. Pour en savoir plus, consultez l’article Nourrir ses chevaux en hiver.

Le soin des pieds

Pour les chevaux gardés à l’extérieur pendant la saison froide, le retrait des fers est recommandé. Leur utilisation chez ces derniers n’est pas nécessaire et pourrait même devenir périlleuse sur des sols dont les conditions sont aussi changeantes que la température. Le port des fers occasionne l’accumulation de boules de neige et de glace sous le pied rendant le cheval plus vulnérable aux accidents. La chaleur de la sole fait partiellement fondre la neige qui gèle et qui, fermement maintenue en place par les bords du fer, forme une boule de glace. La présence de cette neige glacée sous la sole augmente les risques de glisser et de se blesser, mais aussi la possibilité de contusion de la sole, de formation d’abcès, de boiterie, de blessure tendineuse ou ligamentaire. Garder son cheval nu-pieds en hiver exige quand même des soins réguliers. Les visites de votre forgeron devraient se faire aux 6 à 8 semaines et le parage devrait être adapté aux besoins de votre cheval et aux conditions du sol. Il est certain que si vous avez l’intention de monter votre cheval de façon régulière durant l’hiver ou qu’il a besoin d’un ferrage orthopédique pour corriger une condition médicale, le port des fers sera nécessaire dans son cas.

Nous espérons que ces informations vous ont été utiles et qu’elles vous permettront d’envisager d’hiverner vos chevaux à l’extérieur d’un meilleur œil.

NOTE : Les conseils cités dans cet article se veulent des conseils généraux qui s’appliquent à des chevaux adultes, en santé, habitués aux hivers québécois et qui sont destinés à passer l’hiver ou une grande partie de la saison hivernale à l’extérieur. En aucun cas, ces conseils ne devraient se substituer aux avis et recommandations de votre vétérinaire. Si vous envisagez d’hiverner vos chevaux à l’extérieur cet hiver, nous vous recommandons de réviser ce document avec votre vétérinaire afin de vous assurer de la bonne compréhension des informations fournies ainsi que de leur adaptation à vos besoins et à ceux de vos chevaux.

Si vous avez des questions ou nécessitez des informations supplémentaires, n’hésitez pas à nous contacter ou à contacter votre vétérinaire.

L’équipe de l’AVEQ vous souhaite un bon hiver.


Par Sophie Morisset  DMV, Diplomate ACVS

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